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🚇 SK : Arcadia (17/05/2014)

Mots-clés: SK, Noisy le Grand, liaison hectométrique, cable, rail, Maille Horizon, Mont d'Est, Soulé Kermadec

C’est une réalité à laquelle il faut se résoudre : la liaison hectométrique, de son doux nom Soulé Kermadec, n’est plus. Ni les prototypes français dont l’exploitation commerciale n’a jamais vu le jour, ni le fabricant. Ôtant tout espoir de voir rouler cette invention hexagonale un jour. Les seuls éléments concrets sur lesquels se rabattre sont les dernières capsules nespresso de Noisy. Après un repérage stérile l’an passé, je suis repartie à l’assaut aujourd’hui avec à l’esprit la conviction que la fatalité n’existe pas en urbex. Il y a toujours un moyen, un interstice.

D’autant plus plus avec plusieurs paires d’yeux (en l’occurrence, VnC et un collègue cyclopède). Où les chances de remarquer des détails sont exponentielles et l’angoisse potentielle face à la prise de risques, moindre. So, let’s go to terrain vague. Fouinage près des deux sorties du terminus au toit pointu. La plaque est désormais grande ouverte mais n’offre rien de bien intéressant pour les non-récupérateurs. De l’autre côté de la route, en contournant la blafarde palissade, on distingue ce qu’il reste de l’accès handicapé : les escalators gisant sous trois tonnes de terre, tandis que l’ascenseur – bloqué éternellement entre deux niveaux – offre bien peu de prises, rendant soudain vertigineuse la hauteur à dévaler.

Nous repartons dans l’autre sens, vers le ReRe. Auparavant, petite halte aux espaces d’Abraxas pour admirer l’architecture coliséenne. Certes, ce ne sont que des logements mais l’ensemble a un look peu banal, voire antique. Avant de repasser par la gare routière et devant LE rideau de fer qui nous nargue et fait fantasmer bon nombre de nostalgiques et rétro-futuristes, un saut vers la zone commerçante s’impose. Les éléments paysagers des années 60-80 (mosaïques, animaux-jeux pour enfants, escaliers pyramidaux) nous laissent un brin pantois et dubitatifs.

Face au second élément, d’une longue réflexion résultent une concertation commune puis une décision. Pour le meilleur et pour le pire. Pour le froid et pour le noir, in facto. Nous nous jetons finalement à l’eau et optons pour le combo « plouf+jungle »…pour atterrir dans un bâtiment copieusement inondé (eau fraîche à profusion, « seulement » croupie nous espérons). Un plan « pataugeage », pour le moins exotique, dont le récit vous garantira de recueillir un maximum d’audimat, lors d’un dîner mondain… Ouf, c’est le dernier obstacle avant le saint-Graal.

Alimentation électrique et alarme décrites dans les récits d’antan ne sont plus que de lointains souvenirs. Le matériel a beau être cramé, désossé et vandalisé…je suis heureuse de pouvoir L’avoir face à moi, l’admirer et le toucher. Dans un monde dématérialisé, ce genre de preuve concrète témoignant d’une existence ou d’un usage passés a une valeur inestimable. Comme un rêve de gamin qui devient réalité. Après avoir palpé la console et les engins jadis sous blisters ainsi que le carrelage mural des quais dont le « plutôt bon état » tranche nettement avec le reste, nous suivons religieusement les rails, au-dessus desquels sont accrochés des haut-parleurs encore sous plastique et des néons neufs. Chaque entrée en gare vibrante du RER, au-dessus de nos têtes, cause une mini-frayeur, en raison notamment du brouhaha occasionné par la descente des passagers.

Une montée et un virage plus tard, nous arrivons au terminus tantôt vu de dessus. Une des deux bornes de billetteries électroniques dont le paiement s’effectue en francs, un local électrique, une ancienne sortie murée par-dessus le rideau en fer, de multiples tags et graffitis comme sur les véhicules. VnC entreprend l’expérience de l’ascension, se glissant sans encombre entre le mur et le monte-charge. Etant une médiocre grimpeuse et un peu chargée, l’envie ne se fera pas sentir et ressortirai par la piscine en compagnie de mon deuxième acolyte.

Au-delà des traces d’incendie et du bazar d’objets hantant le sol, ce lieu plongé dans le noir, telle une punition, ne m’inspire pas que glauquitude et dépression. Avec un peu d’éclairage, on pourrait lui redonner une seconde vie le rendre convivial et festif, simuler le trajet des SK en les faisant rouler, faire des sessions de lightpainting, … Je refuse de croire qu’il est condamné et définitivement enterré. Et si, pour une fois, ce n’étaient pas les vandales et pilleurs qui avaient le mot de la FIN ?

PS : pas de session randorun today, pour cause de marche de la Bièvre (50k) huarachée tonight. 😉




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